Premier ramadan dans cette chambre que je loue 700€. Là-bas, c'est le sourire commun qui met à table toute la famille, ici c'est le début d'un long moment morne et solitaire.

J'ai fait passer le temps comme j'ai pu. En arpentant les rues de cette ville grise de la banlieue parisienne. Si des maghrébins y vivent, un boucher halal m'a souri tout à l'heure, je viens juste d'arriver et les gens me semblent si froids.

12h, 13h...arriver à 20h ressemble à un marathon. J'aurais bientôt l'envie de rompre le jeûne dans un de ces restaurants sandwichs tenus par des algériens, des marocains ou des turcs. Quelque chose comme une chaleur... De la soupe avant un plat de chawarma ou un casse-croute à je sais pas quoi et qui fera l'affaire.

Y aller en ce premier jour me semble déjà épuisant. Je m'abats sur le lit impersonnel et je tourne le bouton de la radio.En même temps que les données physiologiques-j'ai faim( la soif est la seule absente parce qu'il fait 15 degrés dehors), je sens ce sentiment diffus de mal-être et de quasi nausée qui doit s'appeler l'exil.

15h30 : le temps est-il plus long pendant le ramadan en France ? Je ressors. Je descends les marches. Un silence de désamour habite ce lieu et ces consignes de sécurité en rouge sur fond blanc. Pousser la porte que je réouvrirais tout à l'heure avec ce code dont je dois me souvenir au risque de rester dehors. Nouvelle balade... Mon Dieu que mon pays me manque.

Architecture cartésienne des années 60-70. Bâtiments blancs ou vieilles maisons aux corridors sombres. Parcs qui se réservent un peu du soleil avare, des rues en pente et en montées. L'engouement que j'aurais en Tunisie pour les allées d'une grande surface ou d'un quelconque lieu marchand n'existe pas ici.

Le caducée d'une pharmacie qui clignote, une pizzeria. J'y commande une pizza. Le gérant me regarde d'un oeil mi satirique mi interrogateur: il se demande si je fais ou non le ramadan. Je paye, je sors et de retour, je remets la radio. Radio Orient pour guetter l'appel à la prière du moghreb et pour faire entrer un peu de racines dans ce lieu qui n'en a pas.

Quelques notes de Fairouz, une publicité pour un magasin maghrébin du coin.
Le temps se décoince un peu de sa gangue froide et j'avance mes mains sur ce premier repas de mon ramadan de loin.